Adaptation orange et bleue de l'adaptation pour consoles modernes d'un classique du jeu vidéo, Prince of Persia est une sorte de version friquée du Roi Scorpion croisée avec 300, soit une aventure alourdie de ralentis et d'effets spéciaux dans un Moyen-Orient imaginaire et magique. Le héros de Donnie Darko et du Secret de Brokeback Mountain y joue Dastan, un gamin des rues dont la noblesse de coeur lui permit d'être adopté par le roi de Perse et de devenir prince. Parvenu à l'âge adulte, alors qu'il se promène dans le désert avec ses frères adoptifs et toute leur armée, il tombe sur la forteresse sacrée d'Alamut, que le conseiller de leur père, Ben Kingsley, les persuade d'attaquer après la découverte d'une cargaison d'armes semblant indiquer que la ville sainte s'est secrètement alliée aux ennemis de la Perse. Une bataille et quelques fourberies plus tard, Dastan est en fuite, injustement accusé de haute trahison, encombré d'une princesse peu coopérative mais en possession d'une dague magique permettant de remonter le temps. Fort de ce pouvoir, il va tenter de laver son honneur et de démasquer l'enfoiré qui a tout manigancé pour lui faire porter le chapeau (il n'a pas vu la jaquette avec Ben Kingsley qui fait sa tête de méchant, il ne se doute de rien au début).
Comme c'est tiré d'un jeu, je n'en attendais pas grand'chose, et je n'ai pas été déçu, c'est effectivement ce que j'ai eu, ni plus, ni moins : pas grand'chose. Et attention, même avec si peu, c'est déjà le dessus du panier en matière de jeux vidéo portés au ciné hein, y a des acteurs corrects, un budget conséquent et un réalisateur qui, à défaut de mettre la moindre passion ou inventivité dans son boulot, y a au moins mis du professionnalisme et une certaine compétence. Mais être parmi les meilleurs sur un segment marketing où la concurrence va de "à chier" à "médiocre" est à peu près aussi difficile et glorieux que de battre Emmanuelle Laborit à un concours de chant, surtout quand on a les moyens de Disney. Mike Newell n'a visiblement pas cherché à viser au-dessus de "moyen" tandis qu'il cochait sagement les cases de la liste d'éléments imposés par les producteurs à insérer dans le film.
Prince of Persia emprunte ainsi sans se fouler les sentiers battus du cinéma d'action/aventure moderne. Il y a l'attaque d'une forteresse pour faire comme dans Le Seigneur des Anneaux, mais en pas terrible (et trop visiblement filmée en studio sur fond vert). Il y a du parkour, comme dans les nouveaux James Bond ou Die Hard 4, mais pas du genre à couper le souffle. Trop de ralentis pour faire comme dans les films de Zack Snyder. Des images de synthèse pas spécialement ridicules mais pas impressionnantes non plus. Des personnages sans relief, déjà vus ailleurs, comme l'inévitable princesse pimbêche, parce que c'est comme ça qu'on montre, dans un film en costumes genre Pirates des Caraïbes, que le personnage féminin est moderne, indépendant et fort (même si elle est incapable de résister au charme du héros). On n'est jamais surpris (si ce n'est en constatant qu'à l'époque du film, apparemment, la Perse était entièrement peuplée de babtous), jamais vraiment enthousiasmé.
Il faut dire que ces personnages pas spécialement engageants (joués par des acteurs qui ont à peine l'air d'être à ce qu'ils font) et leurs péripéties mi-molles suivent une intrigue qui, sans être particulièrement plus conne que la moyenne, est tuée très vite par la découverte de la fameuse dague-à-remonter-le-temps. Quand un film s'autorise à se "rembobiner" comme ça, on sait toujours où ça va mener : dans les dix ou quinze dernières minutes, il y aura un faux dénouement cataclysmique, genre les héros meurent, le monde est détruit et tout, et puis à la seconde d'après, les trois quarts du film vont être purement et simplement annulés et remplacés. J'espère que personne n'a l'impression que je révèle un gros coup de théâtre là hein, parce que c'est toujours comme ça. Rappelez-vous de Next. Ca ne se dément jamais, et comme on le sait depuis le début, on a du mal à s'impliquer dans ce qui se passe à l'écran, on a presque envie de sauter directement aux derniers chapitres histoire de pas perdre son temps avec des péripéties qui finiront effacées par leurs protagonistes.
Alors certes, comparé aux autres adaptations de jeux vidéo que j'ai pu voir, ça n'est pas catastrophique, c'est meilleur que les Uwe Boll ou que Max Payne, ça vaut un Tomb Raider. C'est regardable, on ne s'ennuie pas trop, mais c'est vraiment très moyen, sans âme, sans originalité, sans saveur. On n'y retrouve pas ce qui fait le charme du Roi Scorpion, mais c'est plus réussi que sa suite, et les joueurs fans de PoP version Ubisoft y trouveront une certaine fidélité au matériau d'origine. En gros, c'est un film à suivre d'un oeil distrait un après-midi ou un soir où il n'y a vraiment rien d'autre à la télé, mais à 10€ ça ne vaut vraiment pas le coup d'acheter le DVD.